La technologie de l’assurance, ou « InsurTech », a déjà transformé le secteur mondial de l’assurance. Et elle est toujours en évolution, avec des milliards investis en 2020, aussi bien par des assureurs que par des start-up, des investisseurs en capital-risque, des banques de développement et des fonds pour l’innovation avec l’appui de gouvernements. Alors, que sont exactement les InsurTechs et quels sont les défis et les opportunités que cela représente pour le secteur de l’assurance ?

Le secteur de l’assurance s’est transformé et dynamisé au cours de la dernière décennie grâce à la démocratisation des données, et à leur portée véritablement mondiale. La multiplication de smartphones abordables et d’un signal 4G/5G fiable a créé une base de clients de plusieurs milliards. Pour la première fois dans l’histoire, un fermier locataire au Kenya ou un chauffeur routier au Kansas peuvent obtenir une couverture d’assurance sur mesure, souvent sur une base prépayée (« pay-as-you-go », PAYG), adaptée à son style de vie et à ses besoins.

Les anciens systèmes de contrats sur papier, de frais administratifs pour les ajustements à moyen terme, de courtiers locaux vendant des polices annuelles à la commission, etc., sont rapidement remplacés par un marché numérique – et un écosystème – où le pouvoir de la marque, la confiance et les récompenses accordées aux consommateurs sont tout aussi importants que les tarifs.

Ces changements sont largement portés par des innovations d’InsurTech facilitées par des technologies de pointe qui évoluent rapidement, en particulier l’IA et les données massives, les chaînes de blocs, les interfaces de programmation d’application et l’expansion constante des réseaux 5G.

L’IA et les données massives sont des outils puissants lorsqu’il s’agit de définir le risque, ce qui entraîne une politique tarifaire de l’assurance adaptée sur différents marchés. Elles facilitent une plus grande rapidité des processus de demande d’indemnisation, réduisant ainsi les coûts et accélérant les paiements. Elles peuvent également aider à éliminer les préjugés de genre ou de race du processus d’assurance, de sorte que le prix de la couverture ne soit pas influencé par le sexe, l’âge, le revenu, la composition ethnique selon la géolocalisation, ou d’autres préjugés historiques communs dans les anciens systèmes. Les chaînes de blocs s’avèrent utiles notamment pour la conformité, entre autres, car les enregistrements de paiements horodatés, ou les dates d’entrée en vigueur des polices sont essentiels, tandis que les interfaces de programmation d’application permettent aux InsurTechs de connecter les consommateurs à chaque maillon de la chaîne de l’assurance, comme un système nerveux central numérique. La 5G fournit l’infrastructure pour de nouveaux modèles d’interaction entre les fournisseurs et les consommateurs.

En bref, une utilisation plus intelligente et plus personnalisée des données, ainsi qu’un flux de données toujours croissant provenant de multiples appareils et sources, permettent aux InsurTechs de transformer profondément le secteur de l’assurance. Sans les anciens produits, processus ou systèmes informatiques existants pour les limiter, elles sont en mesure de concevoir de nouveaux processus, produits et systèmes numériques à partir de zéro. Elles peuvent utiliser les dernières technologies pour cibler des segments de marché spécifiques, plutôt que d’essayer de fournir des solutions de bout en bout, en utilisant leur expertise numérique pour maximiser la valeur tout en tirant parti de caractéristiques telles que :

  • Une connectivité renforcée : Utilisation de l’intelligence artificielle et des bots pour fournir des conseils « robotisés » par le biais d’une interface client numérique avec distribution numérique.
  • Des concepts de produits ciblés : Offrir des produits personnalisés à petit prix en fonction de l’utilisation ou des services à valeur ajoutée.
  • Une automatisation complète : En appliquant une approche automatisée, les InsurTechs réduisent les coûts et accélèrent les processus pour répondre aux attentes des clients.
  • Des prises de décision et des perspectives basées sur les données : Grâce à l’accès à diverses sources de données, y compris la télématique à partir de boîtiers installés et d’applications pour smartphone, les InsurTech appliquent des techniques d’apprentissage par machine pour offrir des produits et des services innovants et personnalisés.

« Les InsurTechs redéfinissent l’expérience client grâce à des innovations telles que la souscription sans risque, les achats sur place et le traitement des réclamations géré par IA, rendant les démarches du client toujours plus rapides, faciles et efficaces. »

« Dans le secteur automobile, les équipementiers forgent de nouveaux partenariats pour développer des systèmes de paiement embarqués, permettant aux conducteurs de payer leurs frais d’essence, leurs en-cas ou même leurs réservations d’hôtel directement depuis leur véhicule », nous explique Nilüfer Günhan, Directrice des services financiers, Abdul Latif Jameel.

Amélioration contre perturbation

L’InsurTech s’articule autour de deux grands axes : l’amélioration par rapport à la perturbation.

La première concerne la technologie qui améliore, accélère et rationalise les processus existants. Cela représente peut-être 80 % de toutes les InsurTechs. Depuis l’invention de la puce de silicium, les assureurs du monde entier ont progressivement intégré la technologie. Dans un secteur structuré autour des documents et de l’administration, de nombreuses InsurTechs visent à résoudre des problèmes quotidiens des assureurs, des courtiers et des opérateurs, à un coût inférieur à celui des systèmes existants.

Dans son rapport 2019, La montée de l’Insurtech[1], le cabinet de conseil Accenture a interrogé quelque 450 sociétés InsurTech pour mieux comprendre le secteur. Un point important qui en est ressorti est que de nombreux assureurs s’appuient toujours sur les systèmes informatiques existants qui stockent essentiellement les données en toute sécurité dans des silos « cloisonnés ». L’adoption d’un « écosystème de données », plutôt que d’un ancien système cloisonné, est sans doute la plus grande avancée qui permette d’améliorer chaque aspect de l’administration des assurances.

Comme l’indique le rapport Accenture, « Décentralisées, les anciennes technologies entourées de structures traditionnelles de gouvernance d’entreprise et d’informatique peuvent s’avérer être des murs difficiles à abattre. Les InsurTechs doivent envisager de travailler avec d’autres entreprises technologiques pour créer des offres basées sur un écosystème numérique. »

En supprimant tout simplement les barrières virtuelles entre les enregistrements de données, les assureurs et les courtiers peuvent travailler beaucoup plus rapidement avec des entreprises tierces, telles que les sociétés de protection juridique ou les entreprises de récupération de véhicules, tout en améliorant leurs propres processus internes d’administration.

Il existe des centaines d’entreprises qui s’efforcent de dynamiser tous les types de fonctions administratives dans le monde de l’assurance, y compris des acteurs majeurs comme Amazon Web Services, Oracle, DXC Technology, Accenture, CapGemini et d’autres.

À leur tour, les grands acteurs se sont associés à des spécialistes SaaS (Software as a Service) de taille moyenne, comme Pegasystems, Duck Creek, Guidewire Software, OutSystems et bien d’autres. Cela crée un écosystème de connaissances et de ressources auquel les assureurs et les agents peuvent accéder, afin de mieux gérer la transformation d’un système existant en un autre plus flexible, sur mesure et, avant tout, plus axé sur le client.

Ainsi, au lieu de cloisonner les données des assureurs comme dans l’ancien système existant, chaque entreprise partenaire de la chaîne peut choisir de consulter chaque flux de données comme et quand elle en a besoin. Il peut s’agir de tableaux de risques actuariels pour des pertes potentielles liées aux catastrophes sismiques au Japon, ou de données relatives aux demandes d’indemnisation des propriétaires de Mercedes provenant de la zone UE. Le fait est que, grâce à ce partenariat, chaque élément peut être ajouté comme une couche supplémentaire, par n’importe quelle InsurTech, courtier ou assureur, au sein de son propre écosystème d’entreprise. Cela offre aux grands assureurs la possibilité de prendre une nouvelle idée et de l’adapter rapidement, en exploitant les ressources de données et l’expertise que les InsurTechs partenaires apportent.

Autre point important : grâce aux innovations des InsurTechs, le client des assurances effectue désormais un grand nombre des tâches administratives qui étaient auparavant menées à bien par les courtiers, les agents et les assureurs, tous justes dix ans auparavant. Les ajustements à moyen terme tels que les changements d’adresse, d’état civil, d’emploi, etc., sont tous téléchargés par les assurés au moyen d’applications de smartphone. C’est pourquoi chaque assureur a besoin d’un réseau de gestion des données multicanal, conforme et sécurisé, mais qui a la capacité d’automatiser autant de fonctions administratives que possible, du devis au paiement des demandes d’indemnisation.

En effet, c’est dans le domaine des demandes d’indemnisation que les possibilités de développer des produits InsurTech permettraient de gagner un temps précieux dans le processus administratif. Lorsqu’un assureur traite, par exemple, 500 demandes d’indemnisation liées à des accrochages automobiles par mois, tout logiciel capable de gagner quelques minutes entre la déclaration du sinistre et le règlement des demandes d’indemnisation pourrait permettre d’économiser entre 10 et 25 USD par assuré. Chaque avancée technologique SaaS peut paraître un tout petit pas en avant, mais en termes de trésorerie, cela peut avoir un impact très positif sur le résultat net d’un exercice financier.

La perturbation des InsurTechs

C’est là que ça devient intéressant. Lorsque l’on parle de construire l’avenir, on constate souvent un afflux massif de fonds d’investissement et de capital-risque. Cela s’explique en partie par le fait que le secteur de l’amélioration administrative de l’InsurTech est déjà dominé par les plus grandes entreprises mondiales et du classement Fortune 500, qui ont les moyens nécessaires pour faire le travail. Mais il est également vrai que de nombreux marchés d’assurance à travers le monde sont prêts pour la « disruption », ce qui incite une vague toujours plus importante d’investisseurs à envisager d’acheter dans des start-up d’InsurTech.

Selon le rapport trimestriel sur l’InsurTech de Willis Towers Watson[2], la crise liée au COVID-19 n’a pas affecté les investissements dans l’InsurTech en 2020. Au contraire, c’était une année record : « Les investissements mondiaux dans l’InsurTech ont continué à croître au cours d’une année tumultueuse. En 2020, le financement annuel total de l’InsurTech a atteint un niveau record de 7,1 milliards USD, avec 377 transactions. »

Un nouveau type d’assurance automobile

Comme KPMG l’a noté dans un rapport sur les InsurTechs en 2019[3], le passage de la possession d’une voiture à la location, ou simplement l’achat d’abonnements à des services de mobilité urbaine, est l’une des forces les plus perturbatrices qui secouent le marché de l’assurance automobile. Ce processus a été accéléré par la pandémie, en particulier dans les économies occidentales, où les « nomades numériques » sont maintenant libérés des trajets quotidiens vers les bureaux dans les grandes villes.

Les produits de paiement au kilomètre proposés par des sociétés comme Metromile aux États-Unis, By Miles au Royaume-Uni, ou PolicyBazaar en Inde, fonctionnent tous de la même manière : elles évaluent le risque en continu en fonction du comportement du conducteur, des itinéraires parcourus, ainsi que d’autres données recueillies à partir des systèmes DAS intégrés au véhicule.

Nilüfer Günhan
Nilüfer Günhan, directrice des services financiers
Abdul Latif Jameel Finance

Il s’agit d’une évolution considérable en termes de calcul des risques par rapport à la méthode de tableau actuariel existante qui consiste à superposer les codes postaux, les statistiques locales de criminalité, l’historique des demandes d’indemnisation des conducteurs, les emplois, le sexe, l’état civil, etc. Les données relatives aux trajets en voiture étant transmises en cascade aux InsurTechs – et aux assureurs – en temps réel, via des smartphones ou des appareils télématiques, cela permet également à l’IA de calculer les futures primes de renouvellement en fonction des données recueillies. La tarification de l’assurance n’est plus basée sur les remises brutes pour absence de sinistre ou sur des informations telles que l’adresse et l’emploi de l’assuré.

De façon réellement innovante, l’InsurTech permet aux assureurs de personnaliser chaque police en fonction du profil de risque d’un conducteur individuel. De plus, le processus est entièrement automatisé, de sorte qu’il ne peut y avoir aucune accusation de préjugés en fonction du sexe, de l’identité ethnique ou de la classe sociale.

« Au fur et à mesure que le nombre de compagnies d’assurance augmente, celle qui possède la meilleure expérience numérique, la meilleure analyse de données et les meilleures capacités prédictives gagnera les clients, en veillant à ce que ses solutions soient les plus pertinentes, opportunes et intuitives. Ces nouvelles technologies offriront des expériences de plus en plus intégrées », déclare Nilüfer Günhan.

Les marchés en constante évolution renforcent les InsurTechs

Bien que la pandémie de COVID-19 ait suscité un pic d’intérêt pour les nouvelles solutions d’assurance maladie et les produits d’assurance voyage, de nombreux facteurs sociaux majeurs qui influencent la croissance des InsurTech sont beaucoup plus profonds. Les tendances démographiques et sociales à plus long terme créent des opportunités pour les InsurTechs de combler les lacunes du marché et de remettre en question les offres traditionnelles des assureurs établis.

La « génération Z » – les personnes nées entre 1990 et 2005 – atteint maintenant l’âge adulte et recherche l’indépendance financière vis-à-vis de ses parents. Ces jeunes consommateurs ont besoin d’être assurés pour des produits comme les voitures, les vélos, les voyages ou les habitations. Et comme ils ont grandi en utilisant les smartphones comme source d’information principale, ils s’attendent à pouvoir tout faire depuis leur téléphone. Cela signifie que les modèles d’abonnement prépayés PAYG basés sur des applications vont avoir plus d’attrait pour un groupe démographique Netflix que les anciens sites Web d’ordinateurs de bureau et les devis de moteurs de 18 pages, que l’on trouve généralement sur les sites des comparateurs de prix.

À l’autre bout du spectre, il y a une population vieillissante en Amérique du Nord, en Europe et en Asie de l’Est, qui peut avoir besoin d’une assurance voyage médicale préexistante, d’une gamme de produits de santé et de bien-être, ou d’une assurance pour animaux de compagnie.

Le département Eurostat de l’UE a rapporté que les ménages composés d’une seule personne avaient augmenté de 18 % entre 2010 et 2020[4]. En Suède, en Allemagne et en Finlande, les enfants ne vivent que dans 25 % des ménages. Cela signifie que les personnes célibataires, ou les couples, ont plus d’argent à consacrer aux loisirs, aux voyages, à l’achat de gadgets ou même aux primes d’assurance. À mesure que le pourcentage de ménages d’une seule personne augmente, les InsurTechs capitalisent sur le style de vie en solo avec des produits, des services et des modèles commerciaux ciblant spécifiquement ce marché.

L’adoption rapide du smartphone à l’échelle mondiale, même dans les pays en développement, et le déploiement des services 4G/5G constituent un autre facteur crucial. C’est une chose d’avoir un produit InsurTech remarquable, mais il faut aussi un marché de masse. Cette situation évolue à mesure que les smartphones et la 5G deviennent omniprésents, les InsurTechs offrant des services tels que l’assurance des récoltes ou des motos via des systèmes de micropaiement par smartphone.

Par exemple, en Inde, l’assurance des récoltes était traditionnellement vendue par des agents locaux, et achetée avec un paiement unique. Désormais, les petits agriculteurs de toute l’Inde rurale peuvent obtenir un devis sur leur smartphone, assurer une récolte en quelques secondes, et payer grâce à divers services de micro-paiement et de débit. Dans un sens, il s’agit simplement de l’adaptation d’un système existant, l’InsurTech s’appuyant sur la rationalisation de l’administration. Après les États-Unis et le Royaume-Uni, l’Inde est le pays qui reçoit le troisième plus gros montant d’investissement dans les technologies financières, selon l’étude d’Accenture[5] publiée début 2020.

Centres régionaux, soutien à la conformité

De nombreux organismes gouvernementaux, banques et fonds d’investissement ont soutenu l’idée de création de pôles régionaux d’InsurTech pour soutenir ce secteur en plein essor. À Londres, Insurtech UK agit comme une usine d’idées et un intermédiaire pour les investisseurs et les partenariats. La même approche est adoptée dans les villes du monde entier, de Madrid à Berlin, en passant par Dubaï, Santiago, Istanbul et bien d’autres, où des innovateurs partageant la même vision tentent de perturber les marchés locaux de l’assurance, et, à terme, de proposer leurs produits à l’échelle mondiale, souvent en formant des partenariats avec des distributeurs et des assureurs plus importants.

De nombreux pôles régionaux offrent également des prix, du capital-risque et des subventions par le biais de concours annuels ou de récompenses. Seedstars World en Suisse, l’incubateur Lloyd’s Lab à Londres et l’événement NAMIC Fastpitch aux États-Unis ne sont que trois exemples de cette approche de vitrine régionale pour développer des start-up innovantes et les aider à établir des connexions utiles.

En termes de conformité, cette approche de pôle régional offre également aux régulateurs la possibilité d’établir des normes, et aux innovateurs de se conformer efficacement lorsqu’ils conçoivent des produits.

Zego, qui offre une couverture à l’utilisation pour les livreurs en Europe, intègre automatiquement les règles du marché local sur la capacité du moteur, les exigences en matière de permis de conduire, entre autres. De plus, il dispose d’une fonctionnalité de traduction automatique des termes de la police. Cela est important lorsque vous offrez une couverture sur la base du paiement par quarts à des motocyclistes d’Uber Eats ou Deliveroo à l’étranger, dont la langue maternelle peut ne pas être l’anglais.

En Europe, il existe de nombreux incubateurs de l’UE et des gouvernements individuels, ainsi que des subventions qui sont disponibles pour les InsurTechs. Non seulement ces vitrines offrent une gamme importante de contacts et de connaissances en matière de conformité, mais elles peuvent également ouvrir la voie à un financement plus important. Le véritable avantage de rejoindre des associations, ou de participer à des compétitions de pitch soutenues par des gouvernements, est que les InsurTechs peuvent accéder à des conseils structurés et conformes, dès le début de leur parcours.

L’autre avantage en matière de conformité pour les InsurTechs dans l’UE, en Israël, en Inde et sur de nombreux autres marchés, est la question des ratios de capital, ou solvabilité. Alors que les compagnies d’assurance doivent respecter des normes élevées en matière de liquidité du capital et de réserves de trésorerie, en cas de sinistres catastrophiques, les mêmes niveaux de capital ne s’appliquent généralement pas aux InsurTechs. Cela permet aux start-up de tirer le meilleur parti de leur financement disponible, même si elles travaillent sur le même marché hautement réglementé que les grands assureurs.

La distribution est la clé

Aussi passionnant qu’il soit de voir les InsurTechs perturbatrices faire avancer de nouvelles idées et de nouveaux produits, il ne s’agit pas seulement de remettre en cause le statu quo. Les grands assureurs adoptent souvent une double approche, en créant leurs propres centres d’innovation et en investissant des sommes importantes dans de nouvelles InsurTechs. Ils achètent essentiellement des connaissances, ce qu’ils en font ensuite dépend de leur réseau de distribution à l’échelle mondiale et de leur stratégie.

Le géant de l’assurance Zurich, par exemple, a ouvert sa Fonderie d’innovation en 2018, ainsi qu’un Centre d’idées et un programme de prix de l’InsurTech. Au bout de deux ans, il disposait de plus de 700 concepts de produits à étudier[6]. Sans surprise, avoir un volume aussi important d’innovations à examiner s’est avéré impossible à gérer, même pour un géant de l’assurance.

Ce qui est apparu comme une tendance mondiale au cours des dernières années, ce sont les partenariats entre les InsurTechs et de plus grands acteurs, afin que la « preuve de concept » puisse être évaluée au fur et à mesure que l’idée se développe. En d’autres termes, l’idée peut sembler prometteuse, mais les gens achèteront-ils réellement le produit ?

AXA s’est associé à Democrance, basée aux ÉAU, en mai 2020[7], testant d’abord son produit d’assurance numérique en Thaïlande, avant de le déployer sur d’autres marchés en développement. En Pologne, le plus grand assureur local, PZU, s’est récemment associé à Tractable AI[8] pour rationaliser les demandes d’indemnisation automobiles, avant d’appliquer la même technologie de demande automatisée de réparation de carrosserie sur leurs autres marchés. Les tests comparatifs des produits d’InsurTech font partie du processus, et plus les assureurs recueillent de données de déclarations de sinistres au fil du temps, plus ils sont en mesure de trouver des problèmes à résoudre.

L’autre facteur en jeu est le parcours du produit vers le marché, via les canaux de distribution. D’énormes variations de marché sont à prendre en compte. Du point de vue de l’InsurTech, il peut être préférable de développer une idée naissante sous la coupe d’un grand nom des assurances, et de s’appuyer sur ses canaux de vente. Par exemple, le programme Insure-Space de Mapfre, qui offre un financement et six mois de recherche et développement aux start-up. De même, Lloyd’s Lab à Londres et MetLife aux États-Unis ont mis en place un programme d’innovation mondial[9], avec 100 000 USD de financement disponibles pour les InsurTechs basées dans les régions EMEA et Amérique du Nord.

Assurer l’avenir

Alors que l’InsurTech continue de progresser et d’innover autour de nouvelles technologies et de nouveaux services, certaines portions du marché devraient présenter des opportunités significatives. Dans un monde post-pandémique, par exemple, l’assurance santé est susceptible de connaître d’énormes changements. Non seulement les polices d’assurance-vie traditionnelles, soutenues par des éléments comme les données massives, l’IA et les technologies portables, mais aussi de nouveaux produits qui indemnisent l’assuré en cas de perte de revenus ou de confinement à certains endroits, ainsi qu’un dépistage et un diagnostic rapides pour les pathologies non-COVID. De nombreux services de santé nationaux ont rencontré des difficultés à assurer des dépistages ou des contrôles de santé réguliers pendant la pandémie, ce qui offre une énorme opportunité pour les assureurs médicaux et de santé numériques, ainsi que pour les nouvelles start-up.

La tendance au télétravail en Amérique du Nord et en Europe pourrait également entraîner une forte augmentation des produits d’assurance automobile PAYG basés sur des applications, beaucoup d’entre elles collectant également les données en temps réel par défaut. Bien que les appareils télématiques s’améliorent, les consommateurs sont susceptibles de refuser de les acheter si leur smartphone fournit suffisamment de données pour obtenir une police d’assurance de paiement au kilométrage.

L’enquête de Deloitte[10] indique que la pandémie a provoqué un profond changement sur le marché de l’immobilier commercial, de nombreuses entreprises renonçant à la location d’espaces de bureaux commerciaux ou réduisant considérablement leurs opérations. Cela offrira de nouvelles opportunités dans les villes où les espaces de bureaux sont progressivement transformés en appartements, en zones de loisirs, ou mis de côté par les gouvernements locaux pour d’autres usages. Si cette tendance est renforcée par des initiatives en matière de changement climatique et de durabilité, elle pourrait bien entraîner une demande de couverture d’assurance pour les parcs écologiques, les programmes électroniques de covoiturage, les projets de livraison urbaine à faible émission de carbone, et bien plus encore.

Abdul Latif Jameel, par l’intermédiaire d’Abdul Latif Jameel Finance, est déjà fermement implanté sur ce marché passionnant, cherchant de nouvelles façons de proposer des solutions d’assurance et des services financiers directement aux clients.

Nous avons commencé il y a plus de 40 ans en Arabie saoudite, comme pionniers dans le financement automobile, pour permettre aux gens d’acheter une voiture, alors qu’ils ne pouvaient peut-être pas trouver de financement ailleurs.

Depuis lors, nous sommes devenus l’un des plus grands fournisseurs de crédit-bail et de financement automobile au Moyen-Orient. Et nous avons élargi notre offre aux produits de consommation, aux équipements commerciaux, à l’immobilier, ainsi qu’aux produits d’assurance automobile.

Nous élargissons la gamme de conseils et de produits d’assurance que nous proposons, et nous prévoyons d’établir davantage de sociétés de courtage d’assurance, y compris en Égypte, afin de compléter nos services existants en Arabie Saoudite et en Turquie.

En 2020, nous avons lancé un courtier de réassurance affilié à la Lloyds de Londres appelé JENOA, qui fera le pont entre les activités de réassurance de la région MENAT et de la Lloyds de Londres, tout en aidant également à développer et à fournir des produits d’assurance pour répondre aux besoins évolutifs de nos clients.

JENOA conjugue l’histoire et l’héritage avec l’innovation, les capacités de réflexion tournées vers l’avenir et les dernières avancées technologiques sur le marché de la réassurance. Il vise à être un courtier numérique de bout en bout, offrant une suite complète de capacités de courtage en réassurance adaptées aux besoins spécifiques de ses clients.

En tant que représentant désigné du courtier Lloyds HW Wood Ltd, JENOA a accès au plus grand marché mondial de la réassurance, et soutenu par Abdul Latif Jameel Finance, son offre unique lui permet de proposer des solutions traditionnelles du marché londonien, de concevoir des InsurTechs innovantes et d’offrir des solutions conformes à la Sharia, étendant ainsi sa portée à d’autres marchés passionnants au Moyen-Orient, en Afrique du Nord et dans le monde entier.

Mahboob Khan, JENOA
Mahboob Khan
Président-directeur général, JENOA
Directeur général, Assurance et atténuation des risques, Abdul Latif Jameel

« JENOA offre quelque chose de nouveau et de différent sur le marché. Nous abordons la réassurance avec une nouvelle perspective, tout en comprenant les principes fondamentaux qui ont permis au secteur de se développer au cours du siècle dernier.

Alors que le monde adopte la technologie et le numérique à un rythme toujours plus soutenu, nous exploitons sa puissance pour fournir des solutions de pointe à nos clients.

Cette force et cet engagement en faveur de l’innovation nous permettent de repousser les limites et de montrer l’exemple, en encourageant nos clients à établir les bonnes solutions d’assurance et de risque pour permettre à leurs propres entreprises de prospérer », souligne Mahboob Khan, PDG de JENOA.

Le secteur de l’assurance a vu le jour il y a plusieurs siècles, lorsque les commerçants se sont rendu compte que la perte d’une seule cargaison à la suite d’une catastrophe pouvait anéantir toute leur entreprise. Le même équilibre entre le risque et le coût initial étayera également les produits InsurTech du futur, même si les méthodes de distribution et de vente de ces polices ne manqueront pas d’évoluer avec le développement de la technologie. Avec Abdul Latif Jameel Finance, nous sommes impatients de contribuer à cette avancée.

[1] https ://www.accenture.com/ae-en/insights/insurance/rise-insurtech

[2] https ://www.willistowerswatson.com/en-GB/Insights/2021/01/quarterly-insurtech-briefing-q4-2020

[3] https ://home.kpmg/xx/en/home/insights/2019/02/insurtech-10-auto-insurance-disruption-coming-but-director-not-clear-fs.html

[4] https ://ec.europa.eu/eurostat/statistics-explained/index.php/Household_composition_statistics

[5] https ://www.accenture.com/ae-en/insights/insurance/rise-insurtech

[6] Zurich : L’innovation dans l’assurance exige d’avoir ‘le bon état d’esprit’ | Insurance Business (insurancebusinessmag.com)

[7] AXA et Democrance étendent l’assurance inclusive aux clients à l’échelle mondiale, le 18 mai 2020

[8] En Pologne, PZU utilise l’IA pratique pour analyser les dommages automobiles | Insurance Innovation Reporter (iireporter.com)

[9] https ://www.metlife.com/about-us/newsroom/2020/september/metlife-digital-accelerator-partners-with-10-startups/

[10] Perspectives du secteur de l’assurance Deloitte 2021